Notre visite de l’Atelier du livre d’art et de l’estampe
Après la découverte de l’Atelier-Musée de l’imprimerie de Malesherbes en janvier et du Cadratin de Jouy-le-Moutier en juin, 10 adhérents de l’association Lire 95 ont visité le jeudi 6 novembre 2025 l’Atelier du Livre d’Art et de l’Estampe de Auby/Flers-en-Escrebieux.

Cet atelier constitue le patrimoine vivant et matériel de l’Imprimerie nationale devenue IN Groupe en 2018 et dont l’existence remonte à François 1er (1538).

Il s’agit d’un lieu unique en Europe, voire dans le monde, de conservation patrimoniale, de transmission des savoirs et de production, qui associe histoire, technique de l’imprimerie et pratique des savoir-faire ancestraux dans une approche créative et artistique.


Nous avons été particulièrement bien accueillis par une équipe de professionnels extrêmement qualifiés, passionnés et conscients de participer chaque jour à la sauvegarde et à la valorisation du patrimoine culturel.
La visite de l’Atelier a débuté par une présentation chronologique de l’avènement des différents caractères typographiques au fil du temps.
De l’imprimerie royale à l’Imprimerie nationale en passant par l’Imprimerie impériale, nous avons découvert les différentes créations typographiques permettant au pouvoir en place d’affirmer leur politique culturelle et leur contrôle de l’édition.

Sous François 1er, première création d’une typographie royale pour le grec ;
Robert Estienne, imprimeur du Roi fit appel à Claude Garamont tailleur et fondeur de lettres qui grava les poinçons des « Grecs du Roi ».
Puis naissance de l’imprimerie royale qui fut fondé par Louis XIII en 1640 à l’instigation de Richelieu. Elle fut chargée d’imprimer tous les actes officiels puis les textes littéraires et religieux.
Nous avons admiré à travers les présentations des différentes vitrines les poinçons typographiques (exemple : « Grandjean » ou « Romain du roi » (authentique typographie de Louis XIV) poinçons gravés par Louis-René Luce) et leur impression.

Trésor de l’Imprimerie nationale, le cabinet des Poinçons, constitue un patrimoine unique au monde avec ses 700 000 pièces gravées dont la plus grande partie est classée au titre des monuments historiques.
Le poinçon est une tige d’acier à l’extrémité de la laquelle le graveur dessine et grave en relief et à l’envers la lettre.

Les compositeurs typographes de l’Atelier disposent de 7 caractères latins exclusifs : Garamont, GrandJean, Luce, Didot impérial, Marcellin-Legrand, Jaugeon et Gauthier ainsi que des caractères orientaux (65 écritures du monde) créés ou acquis au fil des siècles depuis les « Grecs du Roi » gravés par Claude Garamond pour François 1er.
Ensuite, nous avons été invités à une petite démonstration de ces savoir-faire ancestraux, temps fort de notre visite. Nous avons pu admirer la précision des gestes répétés depuis plus de cinq siècles avec la fabrication des caractères mobiles qui se décompose en trois phases : la gravure d’un poinçon, la frappe d’une matrice, la fonte de caractères typographiques (dans un alliage de plomb, d’antimoine et d’étain).

La richesse de l’Atelier, c’est aussi ses artisans et maîtres d’art qui font vivre chaque jour par leur geste une tradition d’excellence : le graveur (poinçon), le fondeur (la matrice), le compositeur typographe qui place chaque lettre mobile et crée un texte, le correcteur… et l’imprimeur.
A partir de la révolution industrielle au 19e siècle, les machines ont permis progressivement l’automatisation des différentes tâches avec la Linotype (qui compose une ligne de matrices) et surtout la Monotype (clavier qui permet la saisie du texte sur bande papier perforée et fondeuse-composeuse intégrée), ces avancées technologiques majeures sont à l’origine de l’essor de la presse quotidienne et de l’édition.

Pour clôturer la visite, Marie Poirot, responsable éditorial de l’Atelier, nous a présenté quelques exemples de la production remarquable récente, véritables chefs-œuvre à tirage restreint, chaque exemplaire est unique.
Le Gardeur de troupeaux, de Fernando Pessoa :
Textes poétiques de Fernando Pessoa composés à la main en Garamont entrelacés d’une dizaine d’aquarelles originales de Gérard Traquandi, illustrations réalisées pour chaque exemplaire au fil de la lecture du peintre, ouvrage unique, émotion garantie.

Vous pouvez aussi consulter une présentation de l’ouvrage. Il s’agit d’une vidéo réalisée à la Bibliothèque « l’Alcazar » de Marseille en présence de l’artiste Gérard Traquandi et disponible sur Youtube à l’adresse suivante :
https://share.google/SKHvm74kIFZ9A8kFy
Le Cantique des cantiques, traduit par Vincent Schmied :

Voyages en Alexandrie, de Robert Lobet et Bruno Doucey :

Nous avons aussi rencontré l’artiste Valia Eydis, actuellement en résidence à l’Atelier pour la fabrication de son dernier ouvrage, Promenade avec Gogol, présenté au Salon de bibliophilie « Pages » ; Palais de la Femme, du 28 au 30 novembre 2025.
Pour compléter nos connaissances sur l’Atelier :
L’Atelier du livre d’art et de l’estampe
Marie-Claude Hallard





























