Catégorie : Actualités littérature-jeunesse

billets d’actualités de Marie Lou

Les Actus de Marie Lou, mars 2025

Quelques idées de lecture qui sentent bon le printemps…

Autour du Salon de Montreuil (https://slpjplus.fr)

Lettre du 27/03/2025

Pour sa 62e édition, la Foire du livre de jeunesse de Bologne revient du 31 mars au 3 avril 2025, avec l’Estonie à l’honneur. Au programme : un florilège de rencontres et d’expositions avec des artistes jeunesse. Seront présents entre autres : Susie MORGENSTERN (Grande Ourse 2024), Paul COX, Joëlle JOLIVET, Anne HERBAUTS, Marie-Aude MURAIL.

Sur le site Kibookin

En plus de la sélection des comités de lectures, la sélection thématique célèbre la 27e édition du Printemps des Poètes qui se déroule du 14 au 31 mars, et qui met à l’honneur le thème Volcanique. Cette manifestation nationale et internationale a pour vocation de sensibiliser à la poésie sous toutes ses formes.

La pause Kibookin est consacrée à Muriel BLOCH, à l’occasion de sa récente adaptation du conte d’Andersen Le vaillant soldat de plomb au pays des Yôkai , chez Seuil Jeunesse. Elle nous parle des livres qui l’inspirent.

Actualité éditeurs/auteurs

Les Editions des Eléphants nous suggèrent :

  • La graine inconnue, d’Alain Serge DZOTAP et Delphine RENON : Papa offre à sa famille quatre graines : une pour chacun. Bientôt, un papayer, un goyavier et un mandarinier émergent de la terre, mais Léo ignore ce qui sortira de sa « graine inconnue », qui ne montre aucun signe de vie. Devant sa colère et sa frustration, son père l’invite à la patience, expliquant que certaines plantes ont besoin de plus de temps pour pousser. Léo continue de s’occuper de sa graine avec constance et dévouement jusqu’à ce qu’une gigantesque et mystérieuse fleur finisse par éclore, offrant un abri à toute la famille ; dès 3 ans.

Hélium propose :

  • Et à la fin, de Jean-Baptiste DROUOT: Rebondissant sur le happy-end des contes traditionnels, « ils vécurent heureux, etc. », l’auteur-illustrateur cherche de nouvelles idées, puis se laisse vite emporter par la course folle de son imagination…; dès 7 ans.

CotCotCot éditions présente :

  • Déplacements , d’Elisa SARTORI :  l’autrice raconte comment, petit à petit, il est possible de trouver ses repères et de construire son nid dans une nouvelle ville, prenant pour inspiration l’histoire de sa famille expatriée pour raisons professionnelles; dès 6 ans.

Les Grandes Personnes nous offrent :

  • Au fil des saisons : histoires d’arbres et de rochers », de Ianna ANDREADIS : un imagier-photo tout-carton sur la magie de la forêt ; sans texte pour tous.

La Partie présente :

  • Dès Potron-Minet, de Camille LOUZON : c’est un dimanche joyeux, partagé du matin au soir par une petite fille et un écureuil, entre cabanes improvisées, gros goûters, petites bêtises et parties de cache-cache… ; dès 3 ans.
  • Tom Poulpe, de Gaëtan DOREMUS : Sur la plage, alors qu’il poursuit un crabe dans un trou d’eau, Tom se retrouve plongé sous la mer et transformé en poulpe…. Dès 3 ans.

Les 400 coups suggèrent :

  • Arthur le robot aspirateur, de Marie-Catherine LAPOINTE et Aurélie GRAND : dans cet album, Marie-Catherine LAPOINTE traite avec justesse de ces petits moments familiaux qui sont parfois agréablement (ou pas) bouleversés par l’arrivée d’un nouveau gadget. Les illustrations d’Aurélie GRAND, dynamiques et colorées, mettent en scène cette famille avec beaucoup de réalisme et d’humour ; dès 6 ans.
  • L’étrange histoire du chevalier Gaspard, de Roxane BROUILLARD et Ariane CLOUTIER : avec un humour absurde, le lecteur est entraîné dans une quête féérique où le Moyen-Âge se transforme en un véritable théâtre ; dès 7 ans.

Ricochet propose :

  • Fortes et Flamboyantes ! Les femelles dans le monde animal , de Fleur DAUGEY et     Emilie VANVOLSEM: quand on observe la nature objectivement, on se rend compte que les femelles n’ont que faire des préjugés qui entourent leur genre ! dès 6 ans.

Les fourmis rouges proposent :

  • Balbon, le monstre le plus poli du monde, de l’auteur/illustrateur japonais Q-RAIS : un jour, devant une petite ville côtière, un monstre énorme surgit des eaux. Tout le monde est en panique, sauf l’homme le plus distingué de la ville qui, n’écoutant que son courage, s’approche de la créature marine ; dès 3 ans.
  • Une étoile au Vomichelind’Ivan PEAULT et Mona GRANJON : Patrick est un ver de terre qui dirige un célèbre restaurant au cœur du compost. Comme tous les grands cuisiniers, il rêve de décrocher une étoile dans le célèbre guide Vomichelin ; dès 4 ans.

Hongfei présente :

  • Mais où vont les camions ?,de Sophie PULS : dans ce tout-carton pour les tout-petits, on voyage de double-page en double-page avec des camions, leurs conducteurs ou conductrices et leurs marchandises bien spécifiques ; dès 1 an.

Le diplodocus propose :

  • Violet jardin, de Clémence SABBAGH et Laura KIENTZLER : un tout-carton interactif pour découvrir la violette et son écosystème ;  dès 1 an, pour les enfants qui adorent observer le jardin.

Les Editions courtes et longues nous font découvrir :

  • Printemps, de Léa LOUIS :un conte sur la naissance qui nous invite à devenir le témoin privilégié de ce périple intérieur à travers la vision d’un faon qui quitte le ventre douillet de sa mère et entre dans le monde qui s’offre à lui. Le faon grandit, devient daguet, cerf. Enfin, un jour, il rencontre un enfant. Il le regarde. Il n’est pas effrayé car comme lui il est né un jour de printemps ; dès 3 ans.

Et aussi :

Julia CHAUSSON, notre invitée de la saison dernière nous présente son dernier album,  Tout feu tout flamme, chez les éditions A Pas de Loups. Ce livre fait le tour des métiers dans toutes leurs diversités que les enfants peuvent croiser au cours de leur vie, avec un cherche et trouve ; dès 5 ans.

Ont reçu le Prix Sorcières dans les catégories des albums illustrés pour les plus jeunes :

  • 7 comptines d’oiselles et d’oiseaux, de Sarah CHEVEAU (Thierry Magnier) : album illustré destiné aux jeunes enfants.
  • Un abri, d’Adrien PARLANGE (La Partie) : album illustré aux enfants un peu plus grands ; dès 3 ans.
  • L’étoile de Mo, de Yeonju CHOI (Hélium) : un récit illustré destiné aux enfants. dès l’école primaire.

A bientôt

Marie Lou

Les Actus de Marie Lou, février 2025

Autour du Salon de Montreuil (https://slpjplus.fr): sur le site Kibookin

La sélection thématique explore la maison sous toutes ses facettes, du nid douillet au huit-clos horrifique.

La pause Kibookin est consacrée à Gaël AYMON (notre invité de mai 2023), qui révèle les livres et les univers qui l’ont fait grandir et l’inspirent.

Actualité éditeurs/auteurs

Les Editions des Eléphants nous suggèrent :

  • « Cache Noisettes », de May ANGELI : un petit écureuil a perdu ses noisettes, une course effrénée pour un chaleureux souper ; dès 3 ans
  • « Toto », de Hyewon YUM : une petite fille a une tâche de vin sur le front… Nous avons tous quelque chose de différent des autres et c’est cela qui nous rend extraordinaire ; dès 3 ans.

Hélium propose :

  • « La mystérieuse invitation », le premier album jeunesse de Stacey May FOWLES et Marie LAFRANCE : Fougère trouve dans sa boîte aux lettres une mystérieuse enveloppe et y découvre une invitation pour une exposition super exceptionnelle ; dès 4 ans.
  • « Drôles de rencontres dans les airs », d’Olivia COSNEAU et Bernard DUISIT : un pop-up virevoltant pour s’émerveiller de la beauté de la faune et de la flore tropicales ; dès 3 ans.

Didier Jeunesse nous invite à découvrir :

  • « Dans la nature », d’Eve GOMY : dans la nature on trouve de tout. Un album-imagier pour parler de la différence et de la diversité aux enfants
  • « Parfois on tombe », de Randall de SEVE et Kate GARDINER : une histoire rassurante qui dit l’importance d’oser, d’expérimenter et de trébucher parfois, pour mieux grandir et s’épanouir ; dès 3 ans.
  • « Un amour d’ours », de Stéphane SERVANT et Laetitia LE SAUX : une troisième aventure de la famille Ours, après « Boucle d’Ours » et « Un ours, un vrai », une histoire d’amour où petit Ours déjoue les stéréotypes de l’amour et de la séduction ; dès 3 ans.

CotCotCot éditions présente :

  • « Tractopelles », de Fiona MEYNIER : l’histoire transpoilante d’un enfant qui «se prend une pelle en pleine face ; dès 5 ans.

Les Grandes Personnes nous offrent :

  • « Chat de Gouttière », de Jona ESTRELA : une histoire émouvante qui célèbre la fin de vie d’un chat à travers les yeux de Christina, 17 ans et nous plonge aussi dans le quotidien d’une famille, bande dessinée ; dès 7 ans. (prix White Raven 2024, délivré à la Foire du livre de Francfort. Les White Ravens sont une liste de livres établie par la Bibliothèque internationale de la jeunesse, qui recense chaque année deux cents ouvrages pour la jeunesse, récents et remarquables).

La Partie nous présente :

  • « Ce qui sera », le premier livre de Johanna SCHAIBLE : de l’infini passé à l’infini futur, le texte évoque la mesure du temps, et les événements qui nous permettent de le comprendre ; dès 5 ans (lauréat du prix IBBY Belgique 2024) ; dès 3 ans.
  • « Gros Câlin », de Annabelle BUXTON : neuf espèces d’animaux souhaitent tous un gros câlin avant d’aller dormir ; dès 2 ans.
  • « Carnaval », de Catherine LOIZEAU et Béatrice VEILLON : un voyage à travers le monde pour découvrir les multiples visages du carnaval, sa créativité et sa subversion ; dès 6 ans.

Les 400 coups suggèrent :

  • « La cape d’Emile », de Catherine BUQUET et Dominique YELLE : voici une histoire qui touche un thème important pour la plupart des enfants, l’objet fétiche… L’autrice illustre avec douceur cet attachement de l’enfant pour sa cape, mais aussi pour tout ce qu’elle représente pour lui ; dès 2 ans.
  • « C’est mon lit », de Sylvain BOUTON : épuisé par sa balade du jour, Ourson veut faire la sieste, mais son lit est déjà occupé par une inconnue aux cheveux bouclés couleur de miel ; dès 2 ans.

Albin Michel Jeunesse propose :

  • « La Belle et la Bête », de Cécile ROUMIGUIERE et Benjamin LACOMBE : un vieux marchand égaré trouve refuge dans le château d’une créature effrayante : la Bête.

Une récriture magnifique de ce conte classique, dont l’action est située dans un château inspiré de Chambord, et dont les émotions des personnages sont sublimement mises en lumière par Benjamin LACOMBE ; dès 9 ans.

L’Etagère du bas présente :

« La collectionneuse », d’Emmanuèle PETRY-SIRVIN et Lucile PLACIN : depuis toute petite, Tanaquil collectionne tout. Tant et si bien que, tout le long de sa vie, Tanaquil n’a jamais eu de place pour autre chose…Saura-t-elle accueillir ce qui pourrait arriver ? Dès 5 ans.

Et aussi :

  • Le livre « Vivant », de Stéphane SERVANT, illustré par Isabelle SIMLER (notre invitée du mois de mai 2025), est sélectionné pour le PRIX SORCIERES 2025 et pour faire partie de la bibliographie de l’édition 2025 de « Partir en Livre » (chez les éditions Courtes et Longues) : le cycle de la vie raconté de manière poétique à travers les étapes de l’existence d’êtres divers ; dès 6 ans.

Les éditions Sarbacane ont mis sur leur chaîne Youtube le replay de leur webinaire « Le livre d’éveil ». Ce webinaire a eu lieu dans le cadre des journées professionnelles pendant le Salon 2024. Une occasion privilégiée de placer le livre au centre de l’éveil psychomoteur de l’enfant.

https://youtu.be/7DZSe_CQiZ8?si=8IAvcKoZ1CnHD1LR

  • Le Musée national des Arts Asiatiques-Guimet (6 place de l’Iéna, 75116 Paris) propose le 30 mars à 16h le spectacle « Crapaud et le génie du ciel » pour les jeunes à partir de 5 ans, interprété par l’autrice et conteuse Isabelle GENLIS et la musicienne Phuong OANH. Il s’agit de l’un des contes les plus populaires du Vietnam : Crapaud, le roi de l’étang, a beau chanter pour appeler la pluie, elle ne tombe pas et la terre a soif…
https://www.guimet.fr/fr/activites-visites/spectacle-jeune-public-crapaud-et-le-genie-du-ciel

A bientôt                           

Marie Lou          

Les Actus de Marie Lou, décembre 2024

Chères lectrices, chers lecteurs,

Découvrons les lauréat (e)s du Salon 2024 et encore quelques idées de cadeaux…

Autour du Salon de Montreuil (https://slpjplus.fr); Lettres du 21,22, 27 et 29/11 et du 5 et 12/2024

Le Salon a rendu hommage à Bernadette DESPRES, créatrice au dessin de la bande dessinée Tom Tom et Nana. Elle a marqué avec son coup de crayon si expressif des générations d’enfants et toute l’histoire contemporaine de la littérature jeunesse.

Avec près de 198 000 visiteurs, le « rêve général » promis par le Salon, est devenu réalité. Rendez-vous est donné pour la 41e édition du 26/11 au 01/12/2025.

Découvrons les Pépites qui offrent chaque année une formidable opportunité de révéler les talents dans leur diversité. En voici les lauréat (e)s :

La Pépite d’Or:

« Bianca et la forêt des parents égarés », de Marie BOISSON (Misma) ; bande dessinée ; dès 12 ans.

La Pépite « livre illustré » :

« Des siècles et des siècles », de Christophe HONORE et Gwen LE GAC (Thierry Magnier).

La Pépite « Fiction Juniors »:

« Mori », de Marie COLOT et Noémie MARSILY (CotCotCot éditions).

La Pépite « bande dessinée »:

« Hey Djo ! », de Marzena SOWA et Geoffrey DELINTE (Gallimard).

La Pépite « Fiction ados »:

« La danse sauvage d’Harmonie Stark », de Sigrid BAFFERT et Jean-Michel PAYET (L’Ecole des loisirs).

Et pour faire le plein de nouvelles lectures, le Salon vous présente chaque semaine la sélection des comités de lecture ; voir aussi la newsletter Kibookin chaque premier mardi du mois.

Sur le site Kibookin

La sélection thématique propose 40 titres sélectionnés autour du thème « Rêve général ».

La pause Kibookin est consacrée à l’artiste et illustratrice ALBERTINE qui nous confie ses souvenirs de lecture et ses sources d’inspiration.  Son dernier titre écrit par Germano ZULLO: « Tous les bateaux ne prennent pas la mer » (La Joie de Lire),  aborde le thème de la prison. Quand la prison déchire une famille, les petits bateaux aident à passer le temps et les lettres envoyées pansent les plaies, tout doucement ; dès 3 ans.

Actualité auteurs-éditeurs

Flammarion propose :

  • « La fée aux deux visages », de KOCHKA et C. GASTAUD : un conte qui prône la gentillesse et la bienveillance ; dès 5 ans.

Le livre pop-up de Roule Galette et autres contes d’Elena SELENA : un grand livre pop-up pour fêter les 70 ans de Roule Galette ; dès 4 ans.

Des nouvelles de notre invité d’octobre 2022 :

La galerie Huberty § Breyne présente « Ombres portées » : une exposition des toiles à l’huile de François ROCA, où l’artiste ménage l’éternel féminin (36, avenue Matignon, jusqu’au 11 janvier 2025).                           

https://lire95.fr/retour-sur-la-rencontre-avec-francois-roca/

Belles fêtes de fin d’année !

Marie Lou

Retour sur une rencontre avec Anaïs VAUGELADE, le 10 octobre 2024

Deux heures auront été trop courtes pour survoler la carrière et entrer dans la complexité de l’œuvre et du métier d’Anaïs VAUGELADE. Notre rencontre aura surtout permis des aperçus sur la personnalité et les objectifs d’une autrice-illustratrice-éditrice hors du commun.

DEBUTS DE CARRIERE

Sans attendre la fin des ses études de photographie à l’Ecole nationale des Arts décoratifs, Anaïs s’est lancée dans l’illustration, mais a déjà acquis un goût irrépressible pour raconter des histoires.

Anaïs Vaugelade, illustratrice, 1992.

Après avoir travaillé pour les Editions de l’école, elle entre à l’Ecole des loisirs, dont le directeur éditorial est Arthur HUBSCHMID. Inspiré, inspirant, découvreur de talents, celui-ci est un vrai mentor. Anaïs intègre le comité de lecture. La conjonction de plusieurs objectifs simultanés mais pas forcément complémentaires est déterminante : il va falloir à la fois illustrer, écrire des histoires, repérer des auteurs, et plus tard, les suivre c’est-â-dire les former, les conseiller, les orienter.

Cette drôle d’existence dont les séquences sont morcelées, tiraillées par des occupations diverses toujours urgentes et qui exigent, les unes, de la solitude et des pauses, les autres, du lien et de la communication, aurait pu conduire à des états critiques sauf application d’une méthode quasi napoléonienne qu’Anaïs appelle la mise en place de « tunnels de temps » : cloisonnement des heures de la journée, rigoureuse planification de l’emploi du temps. Il faut donc mettre beaucoup de sérieux dans une vie qui ne demanderait qu’à partir en vrille dans les espaces de l’imagination.

Anaïs Vaugelade, autrice-illustratrice, 1993.

C’est pourquoi elle a d’abord choisi des histoires qui peuvent s’écrire de façon fragmentée. Anaïs les a pensées très longuement, pendant des années, en a déterminé la dynamique, les a organisées en un chemin de fer mental, les a charpentées et les a écrites enfin par petites séquences.

Depuis le début des années 70, l’Ecole des Loisirs a basculé, comme d’autres maisons, dans l’édition d’albums qui ne sont plus des livres illustrés comme on les connaissait depuis la comtesse de Ségur, mais de véritables œuvres à double entrée dont tant le texte que l’imagerie racontent à eux deux une histoire. Anaïs Vaugelade a accompagné de toutes ses forces et compétences cette évolution éditoriale. Anaïs dessine, gomme, rature, surcharge, modifie, scanne, photoshope, et pendant tout ce travail l’histoire se prend à exister, le texte se bâtit. C’est une histoire qui se file comme un film, une histoire qui promène le lecteur. « La narration se fait dans l’interstice entre l’image et le texte ».

1998

LES THEMATIQUES

Avec 75 livres à son actif, Anaïs a traité de bien des sujets, certains légers, d’autres graves, voire dramatiques. « Je parle de choses qui m’intéressent, moi ». « Je considère que les enfants sont des humains à part entière ». 

Pour elle, il  est inutile de cacher les réalités aux enfants, car « ils savent tout dès 3 mois ». Et même, il faut aller de l’avant et leur proposer des sujets qui forcent l’entendement, stimulent la réflexion, forcent l’intelligence.

Ainsi dans Les basquettes de Babakar Quichon, elle n’hésite pas à aborder un  sujet digne d’Henri Poincaré : « Voyons ce qui se passe quand le petit cochon arrivé en tête attend l’arrivée de tout ce qu’il a dépassé : le son, la lumière, l’espace, le temps… ».

Ces sujets difficiles, pourvu qu’ils soient enveloppés d’humour et bien mis en scène, passent bien et sont appréciés des plus petits aux très grands.

L’ECRITURE

Pour elle, dans les débuts, pas d’écriture tant qu’on n’a pas déjà pensé longuement à l’histoire, à son déroulé, comme s’il s’agissait de créer un film.

Par la suite, c’est en dessinant que l’histoire s’invente comme si la fabrication de l’image générait non seulement du visuel mais surtout, du sens, et ce sens, une direction à suivre, le texte se bâtissant peu à peu dans la tête. « La narration est comme un fil qui se glisse dans l’interstice entre l’image et le texte ».

C’est ce qui s’est  passé pour l’album Comment fabriquer son grand frère.

Zuza met en place les divers éléments qui composent un corps humain, mais cette accumulation et l’agencement ingénieux des pièces ne font pas avancer le projet, il faut creuser profondément, scientifiquement, la question, et c’est seulement lorsque Zuza aura maîtrisé les mitochondries que le miracle de l’énergie vitale se produira.

Pour une bonne narration, trois ingrédients : l’élan, la recherche, la logique.

LA MISE EN LUMIERE

Pour Anaïs, ce n’est pas forcément la qualité du dessin qui fait celle de l’illustration. C’est plutôt le dialogue entre le texte et l’image, leurs positions respectives. C’est surtout la lumière qui les éclaire, et dans l’album, les couleurs jouent un rôle narratif essentiel.

La couleur guide l’œil du lecteur vers les endroits sensibles de la page ; ainsi elle fait entrer le lecteur dans l’histoire physiquement et mentalement. Elle est rythme, elle est sens. « La couleur est une narration à part entière », même si cela ne se remarque pas d’abord. Merci de la leçon, Claude Ponti !

L’EDITRICE

Anaïs se charge aujourd’hui d’un petit tiers de la collection Albums.

Même si ce n’est plus le cas maintenant, elle s’est également occupé du comité de lecture pendant 10 ans. Elle raconte : «  Nous recevions environ 50 enveloppes par semaine, pour, en moyenne, un livre publiable…Par an. Ce qu’on cherche, c’est avant tout une personnalité, un esprit, un humour, une façon de parler à l’enfance, plutôt qu’un livre parfait et abouti, qui de toutes façons n’arrive quasiment jamais. Les quelques fois où des projets de qualité ont retenu mon attention, et que pourtant, pour des raisons de ligne éditoriale, j’ai décidé de ne PAS publier…ces projets, ces auteurs ont trouvé dans l’année leur place chez « la concurrence ». J’ai ainsi vu passer les dessins d’Emmanuelle HOUDART, d’Ilya GREEN… »

Ensuite l’éditrice travaille avec l’auteur qu’elle a accepté. Avec une priorité : l’histoire. Et un goût pour les livres « d’une seule tête », qui soit à la fois autrice et illustratrice.

Une des toutes premières autrices qu’elle trouvera via ce « comité de lecture » est Audrey POUSSIER, 25 ans à l’époque. Anaïs avait reçu par ailleurs un texte d’Elsa DEVERNOIS. Elle fait un mariage autrice-illustratrice, d’où naîtra Serrez sardines, « qui n’est pas un chef-d’œuvre ». Mais c’est la première pierre d’une œuvre qui se développe, tant pour les petits (Mon pull, J’ai pas dit partez), que pour les jeunes lecteurs : Comment ranger sa chambre en 7 jours seulement (2019), et tout récemment le merveilleux Trois chatons dans la nuit.

Un autre exemple d’une collaboration issue du comité de lecture est celle engagée il y a plus de quinze ans avec Adrien ALBERT.  Elle reçoit d’abord de lui des dessins peu inspirants dans le genre chinois, mais remarque une chose rare : les personnages échangent des regards.

A partir de quoi, le jeune auteur-illustrateur est encouragé, appuyé techniquement, et cela va produire une succession d’albums solides, chaleureux, inventifs, plébiscités par les enfants, dont tout récemment l’adorable Un bisou pour mon frère.

Récemment, Anaïs a travaillé avec Beatrice ALEMAGNA (Même pas en rêve 2021, Le top du top en 2023, Bertha et moi 2024). Cette très grande autrice au travail plastique remarqué a travaillé chez un grand nombre d’éditeurs ; ce qu’elle apprécie dans cette nouvelle collaboration est l’attention portée aux questions d’histoire, de rythme, de narration. 

Anaïs suit actuellement la jeune autrice-illustratrice  XIAOZHU dont l’univers graphique est très touchant et prometteur. Elle nous en présente le premier album :

Mais l’univers de l’édition est aussi un monde impitoyable. L’Ecole des loisirs est une entreprise familiale qui a des objectifs de rentabilité. Il faut gagner l’audience du plus grand nombre, et on peut être amené à soutenir certains livres plus que d’autres.

Et puis, il y a les circonstances…Ainsi la pandémie a-t-elle été fatale pour la série « babby-sitteuse » d’Alice BUNEL, qui avait pourtant si bien commencé.

L’ACTUALITE ET LES PROJETS d’ANAIS

Anaïs travaille maintenant pour un second éditeur, Dupuis, et son label de romans graphiques « Les Ondes Marcinelle ». Elle s’est occupée spécialement de La Chiâle, de Claire BRAUD :

Côté création, elle souhaiterait reprendre la série des histoires des membres de la tribu Quichon. Il lui reste 163 histoires à écrire…

Sinon, à raison d’une page par jour, elle a en cours un livre sur l’adoption d’un chien ; elle crayonne, aquarellise, dilue les encres…

Anaïs VAUGELADE, volontaire, affutée, pugnace, nous a fait partager ses certitudes, ses déceptions, ses espoirs, ses amitiés. Elle a démontré qu’il n’est pas obligatoire de choisir entre trois voies, trois passions, la création, l’illustration, l’édition, mais qu’on peut les cumuler. Elle nous a donné une belle leçon de liberté.

Merci, Anaïs, pour votre engagement professionnel et personnel au service des livres et des lecteurs !

Pour notre bibliothèque associative, nous avons acquis l’album que voici :

C’était l’été, Laurent s’ennuyait. Il demanda la permission d’aller jouer dehors.  » Après tout, tu es grand, maintenant, dit sa maman. Joue dehors, mais ne dépasse pas la barrière. » Laurent alla jusqu’à la barrière… et un tout petit peu plus loin. Et le lendemain, il dépassa le châtaignier. Quand on commence à grandir, c’est pour de bon.