Un livre qui ne m’a jamais quittée

Un livre qui ne m’a jamais quittée

L’autrice de ce texte, ancienne institutrice, est bénévole dans une bibliothèque de Seine-Maritime; elle suit nos activités à distance et est heureuse de nous proposer ce souvenir d’enfance écrit pendant les confinements 2020-2021.

A l’époque, une méthode globale était pratiquée en grande section de maternelle, et ceux qui apprenaient à lire  « sautaient le CP ».

Un jour, devant la classe réunie sur le tapis, la maîtresse sortit un livre souple, plutôt bleu, qu’elle nous présenta comme un trésor car on n’en lirait qu’une page à la fois. C’était l’histoire d’un enfant du Groënland, « Apoutsiak le petit flocon de neige», de Paul-Emile Victor.

On a passé l’année à découvrir dans chaque page la vie extraordinaire de ce petit esquimau. Et la maîtresse avait des images immenses des pages agrandies, pour qu’on puisse voir ensemble tous les détails des dessins. J’admirais d’autant plus ces illustrations que l’institutrice nous avait dit que c’était l’auteur du livre lui-même, Paul-Emile Victor, qui les avait dessinées.

Quand on observait Apoutsiak, elle avait dit qu’il avait les cheveux … comme ceux de Marie-Christine.

Les chiens de traîneau, eux, avaient mes yeux !

Il n’en fallait pas plus pour que je me passionne autant que je le pouvais pour cette histoire.

De retour à la maison, je ne parlais que d’Apoutsiak, de la neige, des igloos, de la viande de phoque …

J’ai appris à lire et j’ai « sauté le CP » !

Je n’ai jamais fait ce voyage, mais un petit tour au Goënland fait toujours partie de mes rêves.

L’été suivant, j’ai eu 6 ans. Pour mon anniversaire, je devais avoir une ardoise avec une craie, c’était mon idée.

J’ai donc déballé ce cadeau que j’attendais, il y avait même une petite éponge dans une boîte.

Alors que je courais dans la salle de bains pour la mouiller, je m’arrêtai en voyant le sourire de mon père. D’un coup d’oeil, je l’avais décrypté.

Je connaissais bien cet air à la fois mystérieux et content de lui. Il sortit alors un autre petit paquet.

C’était encore pour moi : plat, emballé dans le papier blanc où il dessinait ses plans pour son travail … je pensai à un cahier, qui m’aurait déjà fait plaisir.

Mais l’impossible arrive parfois. Il y a des moments qu’on n’oublie jamais.

Devant mes frères et soeurs eux aussi incrédules, je découvris … le livre de la maîtresse ! Oui, « Apoutsiak le petit flocon de neige « !

J’ai ri et pleuré à la fois.

Trop d’émotion quand on n’a que 6 ans.

Mon livre ne m’a jamais quittée.

Marie-Christine

François ROCA, illustrateur

Cette présentation a été diffusée en septembre 2022.


La différence entre une illustration et un tableau de notre invité? Aucune, car chez lui, toute page
est déjà une œuvre d’ar
t.
L’histoire de François ROCA débute le 17 avril 1971 à Lyon, et a une suite : les
études, et précisément au lycée La Martinière. Bien que bon élève, François refuse la voie générale
et oblique vers l’Ecole nationale des Arts Appliqués Olivier de Serres ; de retour à Lyon, il passe par
l’Ecole d’art Emile Cohl. C’est là qu’il fait en 1990 la connaissance de l’auteur-illustrateur Fred
BERNARD, avec qui il nouera une fructueuse collaboration (26 ouvrages communs à ce jour).
François ROCA travaille d’abord comme illustrateur pour le magazine ‘’Je bouquine’’, chez BAYARD
Jeunesse. Puis il réalise des couvertures de romans, telle la série Tom Cox (2001 à 2015). S’ensuit
une carrière extrêmement prolifique, sa bibliographie compte à ce jour 62 ouvrages. En 1996, il est
primé pour ses illustrations de Solinké du grand fleuve (prix Chrétien de Troyes) ; en 1997, La Reine
des fourmis a disparu reçoit le Prix Sorcières. François a déjà reçu huit prix et a été sélectionné
quatre fois pour représenter la France dans des concours internationaux, dont le prestigieux Hans-
Christian-Andersen en 2020. Il a même été fait chevalier des Arts et des Lettres en 2017.
A quelques exceptions près, ses illustrations virtuoses sont des peintures à l’huile de type réaliste.
Elles sont souvent à fond perdu, comme pour inviter le lecteur à entrer dans l’histoire. Elles
occupent souvent toute la page, voire une double page. L’artiste veut que ses illustrations
racontent l’histoire, collaborent au texte, ce qui donne aux albums une particulière densité.
Beaucoup d’images invitent aux grands espaces : Les Amériques, l’Afrique, New York, etc. On voit
très vite que le cinéma a joué un rôle crucial dans l’évolution de la sensibilité artistique de François
ROCA, un créateur épris d’humanité.
« Il faut que chaque image ait son originalité par rapport à celle qui la précède et celle qui la suit,
que l’on avance visuellement dans l’histoire grâce à chacune d’elles ».


Quelques albums choisis:
Jésus Betz (prix Baobab 2001) ; Terriblement vert ! (prix Sorcières 2002) ; Jeanne et le Mokélé (prix
Alphonse Daudet 2002) ; La comédie des ogres (prix Chrétien de Troyes 2003) ; Le pompier de
Lilliputia (prix des Incorruptibles 2011) ; La fille du samouraï ; L’incroyable exploit d’Elinor ;
L’Indien de la Tour Eiffel ; Anya et Tigre blanc ; Le fantôme du Cirque d’hiver ; La malédiction de
l’anneau d’or ; King Kong.

Retour sur la Rencontre avec François ROCA

Reçu à Eaubonne ce 6 octobre 2022, François ROCA nous a subjugués avec son humour, sa verve et ses anecdotes.

Il nous a entrouvert le vaste monde qu’est son œuvre, un univers éclectique, où règnent la passion, la  fantaisie et l’imagination. Une œuvre encensée par le monde de la littérature jeunesse, les critiques, les éditeurs, et qui pourtant n’a pas les enfants pour destination. En somme, un banquet où enfants et les adultes sont conviés et se délectent…

Notre artiste prise autant les textes qu’il illustre que les images qu’il crée,  illustrateur et écrivain s’enrichissent l’un de l’autre. François Roca collabore avec une totale sincérité, mais il sait imposer sa vision des choses et être un véritable co-auteur.

Ses images sont à la fois belles et impeccablement finies. Art et artisanat se conjuguent.

Tantôt, elles reflètent l’intemporel et elles fascinent ; tantôt, elles sont forces d’activation, et elles emportent.

Qu’elles portent à méditer ou qu’elles dessinent l’instant d’un récit, elles captent l’attention et donnent soif de connaître la suite de l’histoire. Derrière chaque image, des questions : pourquoi ? vers où ? comment y arriver ?

Quelles histoires ? François Roca en a privilégié quatre dans son exposé, toutes écrites par Fred Bernard, avec qui il forme un tandem créatif parfaitement efficace. Avec La reine des fourmis, c’est un périple à travers le monde, avec Jeanne et le Mokélé, une exploration palpitante. Dans Jésus Betz et Le pompier de Lilliputia, nous entrons en empathie et fondons d’admiration pour des êtres qui ont su se construire un destin malgré leurs handicaps.

D’où vient son inspiration ?

De ses  admirations : pour des illustrateurs comme Wyeth, des peintres comme Hopper ou Remington, des cinéastes comme Van Dyke, le réalisateur des Tarzan;

pour les vieux mythes, pour les passions de l’adolescence, les films d’aventures, les récits dramatiques ;

pour les belles choses cachées, les curiosités, les bizarreries du monde, le silence parlant des regards, des corps et des postures.

François ROCA nous a invités à voir que ce monde n’est pas irrémédiablement malsain, et qu’il n’est pas besoin de niaiseries dessinées pour le démontrer. Pour lui, il existe bel et bien, et à jamais, ce monde « de la première fleur », logé au fond des yeux des enfants de tous âges. Sa conviction passe plus qu’un message d’espoir, elle communique une certitude.

Parallèlement à son métier d’illustrateur, François Roca vit pleinement celui de peindre, et il nous a montré des portraits de toute beauté ; il expose à la galerie Huberty & Breyne-Les Arts dessinés, Paris, 20 rue Chapon, jusqu’au 29 octobre 2022.   

Le livre que nous avons acquis pour la bibliothèque de Lire95 et que vous pourrez emprunter est Jésus BETZ.

L’éditeur Seuil Jeunesse nous le présente ainsi :

Voici l’histoire de Jésus Betz, l’homme-tronc à la voix de soprano.

Vigie sur un baleinier, éborgné par une mouette, il est recueilli par l’énorme Mamamita. Bientôt, tous deux tombent sous l’emprise de Max Roberto qui les exhibe dans les bars. Lorsqu’il trouve enfin le courage de s’enfuir avec son ami Pollux, il décide de s’enrôler dans un cirque où, enfin traité avec respect, il connaîtra le succès et le bonheur auprès de Suma Katra, une belle acrobate muette… Ce destin hors du commun est raconté d’une manière à la fois touchante et pudique : dans cette lettre à sa mère, Jésus Betz lui pardonne de l’avoir abandonné et lui livre un récit apaisé de tous ses malheurs.

Jesus Betz a obtenu le Prix Baobab 2001 du Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis et le Prix Alphonse Daudet – Goncourt jeunesse 2002.

Le Mot de rentrée de l’équipe

Bonjour à tous ceux qui nous suivent et à tous ceux qui agissent dans notre Association

La rentrée 2022 bat son plein. Déjà, nous avons vécu la première Rencontre 22-23 avec le talentueux
François ROCA. Déjà, se pressent pour leur formation une cinquantaine de futurs lecteurs de Lire et
faire lire. Déjà, se profile à l’horizon du 15 décembre un grand moment, l’anniversaire des 20 ans de
Lire95. Dans ce mois de démarrage de la saison 22-23, initiatives et optimisme sont au programme.
Réunissons et activons tous nos moyens pour une année de pleins bénéfices !

L’équipe Lire95