Retour sur une rencontre avec Charlotte Mollet, le 12 décembre 2024

Retour sur une rencontre avec Charlotte Mollet, le 12 décembre 2024

Charlotte Mollet nous a d’abord évoqué son histoire personnelle, terreau de son devenir professionnel et artistique de graveure.

Au début des années 90, maman de deux enfants, elle a eu à cœur de combiner son désir de création, profondément ancré en elle, à celui d’accompagner à la lecture son fils et sa fille sa fille (porteuse d’une trisomie-21). L’objectif étant de développer  l’autonomie en proposant des textes lisibles et des images parlantes.  

Charlotte nous a parlé d’une dizaine de ses ouvrages, sur la trentaine de sa bibliographie, sans parler de ses œuvres d’artiste.

Il  s’agit essentiellement de contes ou de comptines, le genre qui lui importe le plus car toute la vie y est logée, avec son cortège de dangers, de violences, de souffrances, de joies et de bonheurs.

Une souris verte (Didier Jeunesse, 1993 ; collection Pirouette) :

cet album traité en papiers découpés a connu un très grand succès (prix Sorcières 1994) ; c’est une oeuvre qui ne vieillit pas… peut-être parce qu’elle véhicule l’idée de la « renaissance ».

Le billet bleu (Rouergue, 1995), 

un premier titre signé avec  Anne  Agopian, a été réalisé à l’acrylique sur acétate. Un album inspiré par la figure du Petit Prince, celle qui apparaissait sur le très poétique billet de 50 francs à l’effigie de Saint-Exupéry.  C’est l’histoire d’un billet qui, passant de main en main, finit par se transformer en livre.

Navratil (Rouergue, 1998)

est l’histoire d’un rescapé du Titanic, écrite et illustrée à l’instigation de l’auteur et illustrateur/graveur Olivier Douzou. Charlotte Mollet n’a pas choisi le sujet mais le traiter, c’est pour elle le faire sien, par adoption.

Avant d’être un bébé (Rouergue, 2004)

illustre un texte d’Hughes Paris, un pédopsychiatre. Il raconte l’origine du monde vivant, parle des identités, de l’originalité de chaque être au sein même de sa propre culture.   

Triso-Mike (Thierry Magnier, 2005) a suivi :

Une petite fille raconte l’histoire de son voisin qu’elle appelle Mike parce qu’elle a entendu dire qu’il était trisomique. Mike ne sort jamais seul de chez lui car il a peur. Un jour, la petite fille lui prête son doudou pour qu’il gagne en confiance et en autonomie. [Source Electre]

La Chevelure (Complexe, 2006) 

illustre un texte de Guy de Maupassant.

Catsou (Rouergue, 2008),

qui a été co-signé, « écrit à quatre mains », avec Bénédicte BRUNET, une amie, réalisatrice de films et grande amatrice de chats, est une véritable histoire.

Trop fort ! (Les petites vagues, 2008) :

à nouveau, le doudou sera plus fort que les monstres, les fantômes.

Avec Loup y es-tu ? (Didier Jeunesse, 2009),

Charlotte a commencé la longue aventure de la série Pirouette, grâce à sa rencontre avec Michèle MOREAU.

Bleu d’amour (Bilboquet-Valvert, 2010)

est un livre signé de Carl Norac, qui  avait envie de gâter sa  fille de 11 ans.

Jean Petit qui danse (Didier Jeunesse, 2011),

a été inspiré par les Géants de Flandre. Ce conte, qui trouve sa source dans une histoire abominablement cruelle, est devenu l’accompagnement de toutes les réjouissances du nord de la France. Transmutation, alchimie.

Les textes qui plaisent à Charlotte Mollet, ce sont les contes et les comptines. Car ils enferment l’histoire du monde, où se pressent la vie, la mort, le danger, indissociables. Ils sont le support idéal pour avancer dans la compréhension et pour se situer. Ils font un clin d’œil aux enfants qui souffrent en silence. Et pour l’animation du public enfantin, ils sont l’outil idéal, car ils se chantent, se dansent, se transmettent.

Les Contes et légendes créoles (Magellan, 2024)

font partie d’une collection initiée par les éditions Flyes. Ils embarquent dans l’imaginaire désiré par Galina Kabakova.

Car la gravure sied aux légendes et aux rêves.

Le Chat botté, par Gustave Doré

Charlotte nous a lu en entier un ouvrage qui lui est particulièrement cher :

Le Chat (Rouergue, 2017),

gravure sur bois, réalisé avec Olivier Douzou, et inspiré d’un conte vietnamien.

La xylogravure,

qui met en œuvre le plein, le vide et les aplats, et qui se travaille debout, convient à ses facultés visuelles et à ses goûts sensoriels : gravure sur bois ou autre matériau souple et tendre, comme le linoleum, car ces matières se creusent et se caressent, à la différence des métaux, qui, avant la caresse, s’attaquent, se rongent.

Charlotte fait glisser de la douceur et de la sensualité dans ses créations. Elle sent l’encre monter et diffuser, le papier mat et d’un blanc chaud lui est agréable au toucher, les couleurs flattent le toucher comme la vue.   « On ne sent pas qu’avec les yeux. Tout participe. »

Et tout en tirant devant nous une planche sur le thème des « terrasses de café », elle nous a parlé de son travail.

Par exemple une variation telle l’acrylique grattée sur acétate.

On peut aussi travailler sur deux matrices, par exemple un papier japonais se superposant à un ou deux autres aussi légers, quasi transparents.

Ces unions-rencontres ouvrent des portes vers l’autre, l’inconnu, d’où arrive une création originale d’autant plus vivante qu’elle est le fruit d’un dialogue.

Mais attention à la virtuosité telle un piège. Charlotte nous dit que «  La forme parfaite peut manquer d’humanité. Il devient nécessaire parfois de se détacher, déconstruire, se mettre à dessiner de la main gauche pour préserver l’authenticité, la sincérité. »

Elle nous recommande d’aller visiter l’Atelier du Livre d’art et de l’Estampe de l’Imprimerie nationale, près de Douai. https://atelier-du-livre-art-imprimerienationale.fr/

Les enfants sont très réceptifs dans les ateliers scolaires de gravure car ils s’approprient vite leur production. Ils sont sensibles aux effets de surprise que provoquent l’inversion des tracés et l’échappée de l’encre dans des vides qui au final produisent des pleins.

Le travail de l’artiste n’est pas simple, car outre les lenteurs de la conception et de la création des images, il faut entrer dans le tréfonds de l’histoire et, parfois, mener des recherches savantes préalables.

Cependant, la gravure traditionnelle, qui exige de la patience et de l’obstination, reste un métier de puriste, destiné à un public au regard travaillé. Il est donc nécessaire pour Charlotte Mollet de la rendre populaire, visible. Elle a donc choisi de pratiquer dans des résidences non-dédiées ou dans des ateliers  destinés à un public non-averti, par exemple dans le tiers-lieu qu’est le Café-Jeux Natema, rue des Orteaux (Paris, 20ème) :

https://www.facebook.com/cafejeuxnatema/videos/1217600308362635

Pour préserver l’avenir, elle a transmis des originaux, croquis, matrices à des médiathèques parisiennes (Marguerite Duras, spécialisée dans les livres d’artistes, Françoise-Sagan) et aussi à la BNF, pour qu’ils restent en vie et disponibles.

Pour elle, la vie c’est la créativité, la fantaisie, se savoir unique et être ensemble. C’est une vie risquée, peu enviée des gens dits « normaux ». Mais, dit-elle avec un clin d’œil, «ceux-ci ne sont-ils pas finalement un peu…inquiétants ?»

Est-ce l’effet des images profondes ou celui d’une présentation simple et touchante ? Nous avons trouvé dans tous ces albums de la finesse, de la sensibilité et de la générosité.

Que Charlotte Mollet soit remerciée pour son authenticité et pour son message humaniste.

L’album que nous avons acquis pour notre bibliothèque associative est

Catsou est une petite boule de poils tout roux, un chat que toute la famille a adopté, même s’il adore ses espaces de liberté. Quand on déménage en ville, Catsou perd sa joie de vivre et il faut décider de le rendre aux anciens voisins et à leur jardin… Un album sur l’apprentissage de l’indépendance et du bonheur (notice de l’éditeur).

Notre visite à l’Atelier-Musée de l’Imprimerie de Malesherbes

Le mercredi 29 janvier 2025, une douzaine d’adhérents de Lire 95 sont allés passer la journée à l’Atelier-Musée de l’Imprimerie à Malesherbes,  dans le Loiret, entre Milly-la-Forêt et Pithiviers

Nous avons été accueillis par un médiateur plein d’humour, dynamique, qui nous a fait visiter le musée le matin. Celui-ci est installé dans une ancienne usine de papier carbone qui a fermé au début des années 2000. C’est un immense hangar  qui a permis l’installation de nombreuses machines et en fait le plus grand musée de l’imprimerie d’Europe.

Le conférencier nous a raconté l’histoire de l’imprimerie à partir des machines exposées. On est passé des moines copistes, écrivant sur du parchemin, à Gutenberg au XVème siècle. Une reproduction, en bois, de la machine de Gutenberg est exposée.

La grande invention de ce génie et de son équipe, ce sont les caractères mobiles en métal, assemblés en ligne dans un cadre. Sa formation d’orfèvre lui permettait de maîtriser le travail du métal et la composition des alliages. Il a l’idée de réutiliser le pressoir dont se servaient les vignerons, et il a mis au point des encres : ainsi il a pu imprimer des pages entières beaucoup plus vite que les moines copistes et réutiliser les caractères pour d’autres impressions.

Le premier livre imprimé fut une Bible. L’atelier Gutenberg en a imprimé 180 exemplaires en 3 ans, alors qu’un moine copiste n’en aurait réalisé qu’une pendant ce temps. Cette révolution va permettre la diffusion du savoir, une redécouverte des textes de l’antiquité qui seront mis à disposition d’un plus grand nombre de personnes. C’est le début de l’humanisme avec de nombreux textes profanes imprimés circulant en Europe.

Mais cela demandait de plus en plus de papier ! Le parchemin ne pouvant fournir de telles quantités de matière, on va utiliser du « papier » (inventé en Chine au 2ème siècle de notre ère) fait à partir de vieux chiffons en coton, en lin ou en chanvre.

Ce sera toujours un tirage feuille par feuille jusqu’à la fin du XVIIIème siècle.

Puis le début de la Révolution industrielle en Angleterre va permettre de nombreuses innovations : la première presse entièrement métallique est construite en 1800 et nous en avons vu un exemplaire superbement décoré.

Quelques années plus tard, on utilise la machine à vapeur pour faire fonctionner la presse : cette mécanisation du procédé d’impression permet d’imprimer 3000 feuilles à l’heure. Il faut fournir du papier en continu et on invente du papier fait à partir de cellulose du bois, on produit en rouleaux de 10 à 15 m de long. Les machines vont désormais encrer automatiquement, presser et couper le papier, et nous avons vu un exemplaire de ce type de machine.  A la fin du XIXème siècle sont mises au point les machines rotatives : notre présentateur en a fait tourner une, d’abord lentement puis à la vitesse utilisée dans les ateliers : on ne s’entendait plus ! Et le principal problème des imprimeurs était la surdité.

Nous avons terminé par la plus grande machine à imprimer du Monde, enfin une partie seulement, car la machine entière fait 900 m de long ! C’est une machine qui était à Perpignan et qui a imprimé jusqu’en 2010 la plupart des livres brochés que nous avons eu entre les mains. Elle est en pièces détachées dans les réserves, on n’avait devant nous qu’une toute petite partie, bien moins impressionnante que la rotative.

Nous n’avons pas vu toutes les machines, à peine regardé les vitrines présentant des livres de toute époque, des albums, des journaux….

L’après midi était consacré à deux ateliers :

  • un atelier papier, avec un rappel de l’histoire du papier et la fabrication par chacun d’une feuille de papier ; noter qu’on peut fabriquer du papier avec toutes sortes de végétaux : chanvre, bambou, lin, coton, canne à sucre, bois, ortie, oignon rouge, poireau, tomate…
  • un atelier- composition-impression :      

Ce qui nous a permis de créer cette page glorieuse  et… presque parfaite :

Une journée bien pleine et très enrichissante.  Si votre route passe dans ce coin là, n’hésitez pas à visiter ce musée extraordinaire.

Et si vous passez en Auvergne, allez voir le Moulin à papier Richard-de-Bas, à Ambert.

Les coups de coeur 2024 de Lire95 – série n°4

Jouer et rire, exister, deviner, courage… rêvons !

JOUER et RIRE

Gare au dragon                     

Orianne Lallemand et Thomas Baas           Nathan, 2023

Qui l’emportera, du dragon ou de la souris ? Le dragon veille sur son trésor… mais qui voilà ? Une minuscule souris prête à tout pour s’emparer de la pièce d’or du dragon. Attention ! Le dragon ouvre un œil… que vole cette petite souris ? HOP ! le dragon attrape la petite souris SCRATCH SCRATCH, ça gratte dans le bidon,GRRR Le dragon crache du feu. Le dragon pense avoir grillé la souris HOURRA…Mais qui est accrochée à sa queue ? Dès 3 ans.

pop-up        humour 

          Le petit bidibi                  

Paul Bérato et Charles Dutertre                     Didier Jeunesse, 2022

  comique   loufoque    fratrie   absurde   humour 

Le Papa a dit comme ça : « Les enfants, si vous voulez aller voir votre vieux papinou, il faut aller vous ha… bil…ler. » Les enfants ont tous couru au porte-manteau. Eh ben, mais le petit Bidibi ? Il a dit qu’il voulait rester en maillot de bain… Tranquille ! Zoum zou zoum…Dès 3 ans.

EXISTER

Lièvre et Ours : c’est à moi !                       

Emily Gravett                                  Kaléidoscope, 2016)

disputes    rivalités   amitié    partage

Lièvre et Ours sont les meilleurs amis du monde. Ils jouent, ils se disputent, ils se réconcilient…
Mais ils ont beau être inséparables, Lièvre refuse de partager son ballon ou son cornet de glace avec son meilleur ami. Jusqu’au jour où… Dès 3 ans.

DEVINER

Tout noir                                   

Annette Tarmarkin                Les Grandes personnes, 2010

tendresse     pop-up   bébés lecteurs   petite enfance     livre animé   sans texte   

 Un chat tout noir ? On soulève le rabat pour découvrir une tête toute jaune… Il y a aussi un crocodile, un papillon, des petites bêtes et des grosses bêtes cachées sous les rabats. Dès 3 ans.

Méli mélo de mots              

Valérie Yagoubi et Agnès Audras              Seuil Jeunesse, 2015

livre-jeu  jeux de mots   devinettes et énigmes 

Voici un album pour apprendre à se détacher du sens des mots, s’intéresser aux sons qui les constituent et enrichir son vocabulaire de façon ludique ! Souvent pratiqués dans les classes de maternelle, les rébus constituent un excellent préambule à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Dès 4 ans.

Chacun cherche son mot            

Valérie Yagoubi et Agnès Audras             Seuil Jeunesse, 2020

magie des mots

La fée n’est rien sans sa ba…La fée n’est rien sans sa baguette !
Et toi qu’est ce que tu ferais si tu avais une baguette magique ? « Ce livre propose des devinettes toute simples aux enfants dès la maternelle : pour jouer avec les syllabes et déchiffrer ses premiers mots. Des découpes dans les pages permettent aux plus petits de s’amuser à deviner les mots. L’approche originale de cet ouvrage». Dès 3 ans.

COURAGE…RÊVONS !

Les poulets guerriers        

Catherine Zarcate et Elodie Balandras       Syros, 2011

petits et grands  humour livre à chanter

Il était une fois, dans un village, en Afrique, des poulets adolescents. Ils ont décidé de partir sur le sentier de la guerre! Ils ont coiffé leur crête en crête avec du gel, ont bombé le torse et ont traversé le village en file indienne. Un petit poussin les voit et crie : « Je peux venir avec vous, s’il vous plait? Je peux venir avec vous? » Dès 5 ans.

La fille du pays des neiges                                

He ZHIHONG                               Le Sorbier, 2007

volonté   femmes   travail   pauvreté    apprentissage   école   

Fang vit dans un village tout au nord de la Chine, dans le pays des neiges. Elle aide ses parents aux champs, à la cuisine, et s’occupe de son petit frère. Chaque matin, elle regarde les enfants qui partent pour l’école. Elle rêverait d’être comme eux. Alors, parfois, lorsqu’elle se rend aux champs, elle s’arrête sous les fenêtres de l’école et écoute les leçons de la maîtresse. Ce qu’elle inscrit sur le tableau noir, Fang le recopie sur la neige blanche. Un jour, la maîtresse remarque le manège de Fang. Stupéfaite par l’intelligence et la détermination de la petite fille, l’enseignante se rend par trois fois chez les parents de Fang pour leur demander d’envoyer leur fille à l’école. Dès 6 ans.

Le magasin de mon père                          

Satomi Ichikawa                         Ecole des Loisirs, 2004

langues   voyages    tourisme   différence     enfance   humour   

Le père de Mustafa vend des tapis de toutes les couleurs aux touristes. Un jour, en rangeant les tapis, Moustafa en découvre un troué. Son père accepte de le lui donner, à condition que celui-ci apprenne les langues étrangères. Mais le garçon s’ennuie bien vite et le voilà parti au marché, habillé de son tapis multicolore. Il rencontre alors un coq qui le suit partout… et qui va l’aider à découvrir le charme des langues étrangères. Dès 6 ans.

Little man                                     

Antoine Guilloppé                       Gautier-Languereau, 2014

exil     New-York    liberté

Dans les rues de New York, Little man a fait un rêve. Cassius rêve à New York. Il se promène dans la ville et veut traverser le pont. Dès 7 ans.